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Question de M. Stéphane Sautarel (Cantal - Les Républicains-A) publiée le 11/04/2024

Question posée en séance publique le 10/04/2024

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. Stéphane Sautarel. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

Monsieur le ministre, je n'imaginais pas venir au secours du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, tant sa responsabilité est engagée dans la situation catastrophique de nos finances publiques depuis sept ans. (M. François Patriat s'exclame.) Et pourtant, le voilà devenu l'allié du Parlement, plaidant pour le dépôt d'un projet de loi de finances rectificative (PLFR), tant la digue de nos déficits et de notre dette a lâché.

Ce tsunami menace l'archipel français et inquiète désormais nos compatriotes.

M. Jean-François Husson. Eh oui !

M. Stéphane Sautarel. Toutefois, le jugement élyséen est tombé lundi après-midi dernier. Le Président de la République a déclaré ne pas voir « l'intérêt » d'un PLFR, et a ajouté : « Nous n'avons pas un problème de dépenses excessives, mais un problème de moindres recettes. »

M. Éric Bocquet. Tout à fait !

M. Stéphane Sautarel. Bref, c'est pas nous, c'est la conjoncture, ou pire, ce sont les Français qui ne contribuent pas suffisamment !

Non ! C'est vous et votre gouvernement, monsieur le ministre, qui avez engendré 1 000 milliards d'euros de dépenses publiques supplémentaires et porté notre dette à bientôt 3 200 milliards d'euros. C'est vous qui avez surestimé les recettes, dopées à l'argent public du « quoi qu'il en coûte », et désormais en repli. (M. François Patriat proteste.)

L'examen de ce collectif budgétaire par le Parlement ne doit pas être le fait du prince. Il est dicté par la Constitution et, plus encore, par l'intérêt général.

Le Président de la République accable les partenaires sociaux, ainsi que les collectivités territoriales, peut-être même désormais ses ministres, et surtout les Français, coupables de ne pas payer assez d'impôts, lesquels les assomment pourtant déjà. Sans doute s'agit-il de la préfiguration d'un plan caché d'augmentation des impôts à la suite des élections européennes... Cela n'est pas acceptable !

Recevoir des leçons de la part du mauvais élève de la classe, qui ne reconnaît jamais ses erreurs, est humiliant pour chacun d'entre nous, pour les élus locaux que nous sommes, et dangereux pour notre pays !

M. Jean-François Husson. Très bien !

M. Stéphane Sautarel. Monsieur le ministre, oserez-vous affirmer devant la représentation nationale que vous n'aurez ni recours aux hausses d'impôts ni besoin de réduire la dépense publique au-delà des dix milliards d'euros déjà actés en 2024 et, donc, que vous tablez sur une augmentation du déficit bien au-delà de 5 % du PIB ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics publiée le 11/04/2024

Réponse apportée en séance publique le 10/04/2024

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur Sautarel, vous le savez, le contexte a changé... (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) J'y insiste - vous l'avez dit vous-même -, le contexte économique a changé, et cela se traduit dans les chiffres, lesquels chiffres sont à votre disposition, notamment à celle du rapporteur général de la commission des finances de votre assemblée.

M. Jean-François Husson. Non, pas tous !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Pour rappel, nous avons perdu 20 milliards d'euros de recettes en 2023. Ce ralentissement économique pèse aussi sur l'année 2024, et c'est pourquoi nous avons revu nos prévisions de croissance.

Et oui, les dépenses de l'État ont été maîtrisées ! (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains. - Mme Sylvie Goy-Chavent feint d'applaudir. - M. Jean-François Husson lève les bras au ciel.)

M. Jean-François Husson. C'est une plaisanterie !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. En 2023, nous avons baissé les dépenses de l'État de 8 milliards d'euros. Compte tenu de cette baisse, il nous faut envisager une autre trajectoire.

Le programme de stabilité que nous avons envoyé au Haut Conseil des finances publiques, qui sera présenté en conseil des ministres la semaine prochaine, comporte une nouvelle estimation de notre déficit public pour 2024, puisque nous anticipons désormais un déficit de 5,1 % du PIB.

Cette situation exige que nous fassions de nouveaux efforts.

M. Patrick Kanner. Qui devra les faire ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Nous avons annulé 10 milliards d'euros de crédits dans le budget de l'État, en pleine conformité - j'y insiste - avec la loi organique relative aux lois de finances.

M. Patrick Kanner. Il faut un PLFR !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Nous sommes venus nous expliquer au Sénat comme à l'Assemblée nationale. Nous avons donc respecté le Parlement.

Comment réaliser ces 10 milliards d'euros supplémentaires sans autre texte financier ?

D'abord, nous détenons plus de 7 milliards d'euros de réserve de précaution au sein des ministères, précisément pour faire face à de tels risques et à d'éventuelles difficultés.

M. Jean-François Husson. Et les crédits reportés ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. En outre, nous avons engagé un dialogue avec les collectivités territoriales qui, vous le savez, doivent elles aussi participer à cet effort de redressement des finances publiques. (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, SER, GEST et CRCE-K.)

Enfin, sur le volet des recettes, il n'y a pas de plan caché : nous n'augmenterons pas les impôts des Français.

Mme Valérie Boyer. Attention, votre nez s'allonge comme celui de Pinocchio !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Nous n'excluons pas d'agir sur les rentes, ainsi que le Premier ministre l'a indiqué, en mettant à contribution les énergéticiens ou en taxant les rachats d'actions.

Monsieur Sautarel, je regrette que votre groupe n'ait pas assisté au rendez-vous que Bruno Le Maire et moi-même avons organisé, afin de travailler à ces pistes d'économies. Vous étiez absents ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. - Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour la réplique.

M. Stéphane Sautarel. Monsieur le ministre, le rapporteur général de notre commission des finances était présent à ce rendez-vous ; en revanche, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique n'est pas là aujourd'hui !

M. François Patriat. Il travaille !

M. Stéphane Sautarel. M. Le Maire a annoncé que la France respecterait la règle des 3 % de déficit public d'ici à 2027, mais je ne vois pas comment nous pourrions la tenir.

Je vous confie un message à son adresse et à celle du Président de la République : la confiance est déjà « pétée », comme le chef de l'État le dit lui-même. C'est lui, c'est vous qui avez rompu la confiance avec le pays tout entier. Votre déni de la réalité ne fera qu'amplifier le fossé qui se creuse entre vous, les Français et leurs représentants.

Je conclus par la formule d'un grand Auvergnat...

M. le président. Il faut conclure !

M. Stéphane Sautarel. ... qui inspire humilité et conscience : « Il vaut mieux partir quand on peut rester que rester quand on doit partir. » (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

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